Corte di cassazione francese, decisione del 28 gennaio 2015
Attendu, selon lʼarrêt attaqué (Chambéry, 22 octobre 2013), que le ministère public a formé opposition au mariage de M. X…, de nationalité française, et de M. Y…, de nationalité marocaine résidant en France, sur le fondement de lʼarticle 55 de la Constitution, de lʼarticle 5 de la Convention franco marocaine, du 10 août 1981, relative au statut des personnes et de la famille et à la coopération judiciaire, et des articles 175 1 du code civil, 422 et 423 du code de procédure civile; que MM. X… et Y… ont saisi le tribunal dʼune demande tendant, à titre principal, à lʼannulation, subsidiairement, à la mainlevée de lʼopposition;
Sur le premier moyen, […] :
Attendu que le procureur général fait grief à lʼarrêt dʼécarter la Convention franco marocaine au profit des principes supérieurs du nouvel ordre public international instaurés par la loi du 17 mai 2013 et en conséquence de ne pas reconnaître une supériorité du traité sur la loi suivant le principe habituel de la hiérarchie des normes ;
Attendu que le motif de droit énoncé par lʼarrêt pour ne pas reconnaître la supériorité du traité sur la loi suivant le principe habituel de la hiérarchie des normes ne peut constituer un des termes dʼune contradiction donnant ouverture à cassation ; que le moyen est donc irrecevable ;
Sur le second moyen :
Attendu que le procureur général fait grief à lʼarrêt de donner mainlevée de lʼopposition au mariage de MM. X… et Y…, alors, selon le moyen :
1°/ que, selon lʼarticle 55 de la Constitution du 4 octobre 1958, « les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par lʼautre partie » ; que la Convention bilatérale franco marocaine du 10 août 1981 a été régulièrement ratifiée par la France, traduite en droit français par le décret n° 83 435 du 27 mai 1983 et publiée au Journal Officiel du 1er juin 1983, et a fait lʼobjet de réciprocité ; que dès lors, cette Convention a une valeur supra légale ; quʼainsi, en écartant lʼapplication de lʼarticle 5 de la Convention prévoyant que « les conditions de fond du mariage tels que lʼâge matrimonial et le consentement, de même que les empêchements, notamment ceux résultant des liens de parenté ou dʼalliance, sont régies pour chacun des futurs époux par la loi de celui des deux Etats dont il a la nationalité », pour faire prévaloir les dispositions prévues à lʼarticle 202 1,alinéa 2, du code civil, instauré par la loi du 17 mai 2013 selon lesquelles « deux personnes de même sexe peuvent contracter mariage lorsque, pour au moins lʼune dʼelles, soit sa loi personnelle, soit la loi de lʼEtat sur le territoire duquel elle a son domicile ou sa résidence, le permet », la cour dʼappel a violé lʼarticle 55 de la Constitution du 4 octobre 1958 ;
2°/ que, selon lʼarticle 3 du code civil, « …les lois concernant lʼétat et la capacité des personnes régissent les Français même résident en pays étrangers » ;que selon lʼarticle 5 de la Convention franco marocaine du 10 août 1981, « les conditions de fond du mariage tels que lʼâge matrimonial et le consentement, de même que les empêchements, notamment ceux résultant des liens de parenté ou dʼalliance, sont régis pour chacun des futurs époux par la loi de celui des deux Etats dont il a la nationalité » ; que selon lʼarticle 4 de ladite Convention, « la loi de lʼun des deux Etats désignés par la présente Convention ne peut être écartée par les juridictions de lʼautre Etat que si elle est manifestement incompatible avec lʼordre public » ; que lʼarticle 5 précité nʼest pas contraire ni manifestement incompatible à la conception française de lʼordre public international tel quʼenvisagé par la loi française du 17 mai 2013, en ce quʼil ne heurte aucun principe essentiel du droit français ni un ordre public international en matière dʼétat des personnes ; quʼen écartant lʼapplication de la Convention franco marocaine au profit de principes supérieurs dʼun nouvel ordre public international, instaurés par la loi du 17 mai 2013, la cour dʼappel a violé lʼarticle 3 du code civil ainsi que les principes du droit international privé ;
Mais attendu que si, selon lʼarticle 5 de la Convention franco marocaine du 10 août 1981 relative au statut des personnes et de la famille et à la coopération judiciaire, les conditions de fond du mariage telles que les empêchements, sont régies pour chacun des futurs époux par la loi de celui des deux Etats dont il a la nationalité, son article 4 précise que la loi de lʼun des deux Etats désignés par la Convention peut être écartée
par les juridictions de lʼautre Etat si elle est manifestement incompatible avec lʼordre public ; que tel est le cas de la loi marocaine compétente qui sʼoppose au mariage de personnes de même sexe dès lors que, pour au moins lʼune dʼelles, soit la loi personnelle, soit la loi de lʼEtat sur le territoire duquel elle a son domicile ou sa résidence le permet ; que, par ce motif de pur droit, suggéré par la défense et substitué à ceux critiqués, lʼarrêt se trouve
légalement justifié ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi
Président : Mme Batut
Rapporteur : M. Hascher, conseiller
Avocat général : M. Sarcelet
Avocat(s) : SCP Meier-Bourdeau ; SCP Spinosi et Sureau ; Me Rémy-Corlay